Ecole primaire et fracture numérique
Selon un rapport PISA de l’OCDE, les nouvelles technologies à l’école ne sont pas d’un grand secours pour combler les écarts de compétences entre élèves favorisés et défavorisés. Donner l’accès aux tablettes dans les classes d’école n’est pas synonyme de réduction de la fracture numérique, qui ne concerne pas seulement l’équipement en tant que tel, mais désigne aussi les compétences d’utilisation.
Equipements numériques et hiérarchie sociale
Selon Philippe Bihouix et Karine Mauvilly, la fracture numérique n’est pas celle que l’on croit: le projet Inéduc, réalisé sur 38 collèges publics et privés de France (l’équivalent du Cycle d’orientation en Suisse) révèle que plus on grimpe dans la hiérarchie sociale, moins les jeunes sont pourvus de matériel numérique. En d’autres termes, selon le chercheur Pascal Blanchard, plus le niveau socio-économique est bas, plus le numérique s’installe dans la chambre. Il pointe des « retraits éducatifs importants » dans les milieux populaires.
Compétences d’utilisation du numérique
Toujours selon ces deux auteurs, il apparaît désormais que la fracture numérique porte moins sur le taux d’équipement que sur la compétence dans l’utilisation du numérique: « À niveaux d’accès identiques, tous les élèves n’ont pas les connaissances et les compétences leur permettant de tirer profit des ressources à leur disposition », note l’OCDE.
Dans le rapport de l’OCDE/Pisa 2015 , “Students, computers and learning Making the connection (PISA)“ on peut lire que les nouvelles technologies à l’école ne sont pas d’un grand secours pour combler les écarts de compétences entre élèves favorisés et défavorisés.
Les projets numériques de type «classe inversée» (cours regardés en vidéo à la maison, devoirs et exercices faits en classe) deviendraient même des facteurs d’amplification des inégalités, le visionnage des cours se faisant à la maison, dans des contextes familiaux différents. La responsabilité éducative des familles de doter l’enfant des disposition socio-cognitives et des ressources numériques nécessaires à la réussite en classe est également mentionnée par Julie Denouël, questionnant dans son article Communiquer à l’ère numérique. Regards croisés sur la sociologie des usages l’argument-promesse de l’autonomie des élèves avec le numérique. Elle montre ainsi que certaines compétences numériques sont plus attendues que transmises en classe, et que, loin de loin de soutenir l’autonomie de tous les élèves, l’usage des nouvelles technologies à l’école serait susceptible de renforcer les inégalités numériques, éducatives et sociales déjà existantes.
Références
Bihouix Philippe et Mauvilly Karine, Le désastre de l’école numérique, Editions du Seuil: août 2016.
Denouël Julie, Fabien Granjon Fabien, dirs, Communiquer à l’ère numérique. Regards croisés sur la sociologie des usages. Paris, Éd. Transvalor/Presses des Mines, coll. sciences sociales, 2011.
Le Mentec Mickaël et Plantard Pascal, «INEDUC: pratiques numériques des adolescents et territoires», Netcom [En ligne], 28-3/4 | 2014, mis en ligne le 01 octobre 2015, consulté le 11 novembre 2020.
Patino Bruno, La civilisation du poisson rouge, Ed. Grasset, 2019.
Plantard Pascal, «Contre la « fracture numérique», pas de coup de tablette magique! », Revue Projet, 2015/2 (N° 345), p. 23-30.
Régnauld Irénée et Benayoun Yaël, Technologie partout, démocratie nulle part, Ed. FYP, 2020.